Cameroun – Wesley Ngo Baheng : « Le sélectionneur venait de venir me voir pour aller aux JO… »

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Passé par les centres de formation du Havre et de Newcastle, Wesley Ngo Baheng avait tout pour martyriser les défenses adverses. Mais entre malchance, entourage douteux et choix discutables, le natif du Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis) a dû se résoudre à raccrocher les crampons prématurément. Portrait d’un homme qui a dû se réinventer.

Ils ne font pas la une des journaux, ne sont pas sur le devant de la scène et sont retombés, parfois brutalement, dans l’anonymat. Pourtant, eux aussi tapaient le cuir depuis gamin avec le rêve de devenir footballeur professionnel, de vivre confortablement de leur passion et d’être adulé des foules. Eux aussi ont fourni les efforts incommensurables du sport de haut niveau pour y parvenir, souvent en quittant le cocon familial très jeune et en mettant toute leur énergie au service de leur passion. Et pourtant, le rêve ne s’est pas réalisé. Eux, ce sont les grands oubliés de l’histoire du football. Ils n’ont fait que caresser leurs ambitions alors qu’on leur promettait la gloire. Wesley est assurément de cette trempe là.

Quand le sort s’acharne…

Le Franco-Camerounais, 33 ans aujourd’hui, était promis à un grand avenir. Pépite du centre de formation du Havre, il traverse la Manche en 2007 pour rejoindre Newcastle United et signe son premier contrat professionnel à 17 ans. Le cocktail des ennuis commence alors : « J’ai perdu ma mère dix jours avant d’arriver. J’étais heureux de réaliser mon rêve, mais je venais de perdre celle grâce à qui j’étais là. J’étais au fond du trou. Et j’ai mis ça de côté, je n’ai jamais fait mon deuil. Je me cachais derrière mes nouveaux moyens. Donc ça part mal, en plus je culpabilisais de laisser mon frère seul en France. Jusqu’à aujourd’hui… (Il marque une pause.) Je n’ai pas été là pour lui. Il avait dix ans et demi à l’époque. Bref, j’arrive la tête ultra-lourde » confiait-il récemment à So Foot. Puis s’en suit une brouille juridique qui l’empêche de jouer pendant six mois. Dans le même temps, il se rend compte que son agente, peu scrupuleuse, profite de sa vulnérabilité pour lui soutirer de l’argent.

Malgré ces aléas, Wesley finit par faire son trou : « En fin de saison, j’arrive dans le groupe pro et je me fais les croisés. Kevin Keagan venait de me dire que j’allais jouer sur la fin de championnat, parce qu’il comptait sur moi la saison suivante. Le sélectionneur du Cameroun venait de venir me voir pour aller aux JO. » La poisse. Wesley n’ira pas à Pékin avec les Lions Indomptables. Un an pour revenir, avant de replonger une nouvelle fois. Une déchirure à la cuisse sonnera le glas de ses espoirs de Premier League avec les Magpies. La suite ne sera qu’une lente dégringolade. Quelques piges en League Two, le quatrième échelon du football professionnel anglais, une palanquée d’essais non concluants aux quatre coins du monde puis un retour au bercail dans différents clubs de divisions inférieures (Le Blanc-Mesnil, Dieppe, Alfortville) avant de dire stop à l’âge de 26 ans.

Se reconstruire après l'échec

Le chemin de la rédemption est rarement un long fleuve tranquille. Jadis aux portes de la Premier League, le désormais ex-joueur à la carrière cabossée est touché. Une nouvelle blessure, morale cette fois. « Quand tu fais ça depuis toujours, dès lors qu’on t’enlève de ce quotidien là, c’est terrible à vivre. Tu te sens inutile. Tu te demandes même si tu es intéressant. » confiait-il en début d’année dans l’émission « Les Yeux d’Olivier » sur France 2. « Je dormais chez mon oncle à Paris, et pour la première fois de ma vie je me suis ennuyé. Je ne savais pas ce que c’était l’ennui. Je sortais la nuit à Paris et je marchais des kilomètres et des kilomètres. Je voyais mon compte bancaire diminuer ». Jusqu’à se retrouver à statuer ses dettes au tribunal de Bobigny.

Mais Wesley, qui a gardé son mental d’athlète, ne se laisse pas consumer par son spleen, et finit par prendre un nouveau départ. Il se lance d’abord dans le milieu associatif, où il travaille auprès des jeunes du Blanc-Mesnil, chez lui, là où tout a commencé. Rattrapé par son amour du ballon rond, il devient ensuite agent de footballeur. Avec Mathieu Manset, il lance MSG Consulting, une structure qui aide les anciens joueurs à se reconvertir. S’il n’a pas atteint les sommets qu’il espérait, il n’a néanmoins pas à rougir de son parcours, qui sert aujourd’hui d’exemple. En choisissant d’aider les anciens footballeurs à faire face à la vie d’après, cet amoureux de rap a su se réinventer en faisant preuve d’altruisme. À la fois si proche et si loin du rectangle vert…

Cameroun – Wesley Ngo Baheng : « Le sélectionneur venait de venir me voir pour aller aux JO… »

Anthony Olivier

Explorateur et gratte-plume du football africain, j'aime brosser le portrait des nouvelles pépites du continent.