Nii Lamptey, itinéraire d’un talent gâché

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Il aurait dû devenir une superstar mondiale mais, au final, peu connaissent son histoire. Nii Lamptey, adoubé par Pelé himself, est finalement devenu un joueur anonyme dont l'histoire sert à prévenir les footballeurs en herbe: à 19 ans, il avait le monde à ses pieds mais, à cause d'un agent peu scrupuleux et de blessures à répétition, le Ghanéen n'a jamais percé.


Il fut un temps où Nii Odartey Lamptey avait le monde du football à ses pieds. Une période bénie où le Roi Pelé l'avait désigné comme son successeur. En 1989, le Ghanéen n'avait que 15 ans et tout l'avenir devant lui. Aujourd'hui, à 37 ans, il ne reste qu'un immense sentiment de gâchis pour la star africaine oubliée.

La vie n'a d'ailleurs jamais été tendre pour Lamptey. Sa jeunesse, entre Accra et Kumasi, ressemble à un cauchemar. Entre un père alcoolique qui le bat et le brûle avec des mégots de cigarettes ou une mère qui le délaisse, le natif de Tema n'a que le football. Ca tombe bien: il est plutôt bon balle au pied. Comme beaucoup de jeunes de son âge, il n'y a que le ballon rond qui l'intéresse et Lamptey joue à l'école buissonnière, évitant également de revenir à la maison où le divorce de ses parents et son renvoi dans la rue ne l'incite de toute façon pas à rentrer.

Sur le terrain, par contre, ses arabesques, sa vitesse et sa technique font de lui un héros. Champion du monde des moins de 17 ans avec le Ghana, Lamptey brille et éclipse les Alessandro Del Piero, Juan Sebastian Veron, Adriano, Josep Guardiola, Andrej Juskowiak, Samuel Kuffour, Demetrio Albertini et autres Marcelo Gallardo en terminant meilleur joueur de la compétition. C'est le temps de l'insouciance et Lamptey danse sur le monde avec le Ghana: champion du monde U17 en 1991, champion d'Afrique U20 en 1993, finaliste de la Coupe du monde U21 en 1993 ou médaille de bronze aux JO de 1992… et, bien sûr, ce fameux transfert en Europe qui fait rêver tous les footballeurs africains.

Enfant prodige, homme maudit

Mais, même là, cela se fait dans la difficulté: les autorités locales lui confisquent son passeport et l'apprenti footballeur est obligé de fuir au Nigeria pour rejoindre Anderlecht et la Belgique. C'est déjà le début de la fin. Ses débuts sont encourageants: son talent est tel que la fédération belge abaisse l'âge limite afin de lui permettre de jouer avec les pros, à 15 ans à peine. À Anderlecht, Lamptey signe son premier contrat professionnel, mais, ne sachant pas lire, il est lié à Antonio Caliendo qui l'envoie, contre son gré au PSV Eindhoven. Cet agent peu scrupuleux abusera de la naïveté du joueur et le transfère souvent afin de récupérer les 25% de commission inscrits dans le contrat qui le lie à Lamptey: d'abord à Aston Villa, où il ne s'impose pas puis Coventry et Venise. Transféré à Santa Fé, en Argentine, son quatrième club en autant de saisons, Lamptey traîne son spleen.

Sa vie personnelle ne s'améliore pas puisque le Black Stars perd deux enfants tandis que sa famille le renie pour son mariage inter-tribal. En plus, ses performances, aussi brillantes soient-elles ne sont qu'épisodiques puisque le joueur est régulièrement blessé. Sa carrière l'emmène par la suite de Ankaragücü (Turquie) à Al Nasr Riyad (Arabie Saoudite) en passant par União Leiria (Portugal) et Greuther Fürth (Allemagne) via Shandong Lu Neng (Chine), Asante Kotoko (Ghana) et Jomo Cosmos (Afrique du Sud). Un CV de véritable globe-trotter qui ne fait que souligner son profil d'esclave moderne à la solde d'un agent véreux. Aujourd'hui, Lamptey s'occupe d'un ferme à Accra. Loin loin des terrains de foot.

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Nicholas Mc Anally