En cette période de ramadan pour les musulmans, une nouvelle polémique a éclaté en France avec la décision de la FFF d'interdire le jeûne dans les sélections tricolores et de ne pas prévoir de pause pour rompre le jeûne durant les matchs amateurs.
Entraîneur du Red Star, Habib Beye a poussé un coup de gueule retentissant à ce sujet à l'issue du match nul de son équipe contre Nancy (1-1) vendredi pour le compte de la 26e journée de National. “Ma position, elle est que je respecte vraiment la foi de mes joueurs, quelle qu'elle soit, à partir du moment où j'ai des joueurs qui sont de confession musulmane et qui font le ramadan – mais j'ai des joueurs aussi qui font le carême en ce moment, c'est 46 jours, donc c'est différent dans l'approche de cette religion. On se permet en tout cas d'accompagner nos joueurs dans leur foi, et personne ne le dit, mais ce qu'il faut comprendre, c'est qu'ne on voit que les inconvénients. Moi, je ne vois que les avantages : ça crée de la cohésion. ça crée aussi des discussions, ça crée aussi une solidarité que peut-être les gens ne voient pas sur un terrain de football. Et pour moi c'est très important de respecter ça”, a plaidé l'ex-international sénégalais.
“J'appelle ça de la discrimination religieuse”
Le consultant de Canal+ a poursuivi sa tirade en dénonçant une forme de stigmatisation des joueurs musulmans : “Quand on a recruté nos joueurs, on savait très très bien qui ils étaient humainement, quelle religion ils avaient avant, donc on ne s'est pas réveillés la veille du ramadan. Comme je l'ai dit, notre job c'est de les accompagner. Et, ce que je vois aujourd'hui, ce que j'entends, ce que je lis, malheureusement, c'est très dur à lire, très dur à entendre pour moi. Parce que j'appelle ça de la discrimination religieuse et qu'on ne peut pas se comporter de cette façon. Parce que si on le fait sur une religion, il faut le faire sur toutes les religions. Et ça n'est pas le cas aujourd'hui. Et, ce qui me dérange, c'est de penser aujourd'hui que des joueurs ne sont pas performants parce qu'ils font le ramadan. Quand vous regardez mon équipe, j'en ai 14 (qui font le ramadan, ndlr). J'ai 5 joueurs qui font le carême. Donc, sur un groupe de 26 joueurs, j'ai 19 joueurs qui sont impliqués dans une religion qui amène à jeûner; pour les musulmans d'une certaine façon, pour ceux qui font le carême d'une autre façon. Moi, j'ai un respect immense pour mes joueurs qui justement sont dans leur foi parce que, ce qu'on ne se rend pas compte c'est qu'à ce moment-là, ils se retrouvent avec eux-mêmes, et que c'est une force supplémentaire pour eux. Je déteste ce débat qu'il y a autour de la religion parce qu'il ne devrait pas exister. Ça ne devrait être un problème pour aucun des entraîneurs qui entraînent des joueurs qui sont dans des fois multiples et je dis multiples parce qu'il n'y a pas que la religion musulmane aujourd'hui et qu'on stigmatise cette religion et qu'on est en train de mettre les gens dans des cases. On est en train de diviser alors qu'on devrait aujourd'hui unir, cette logique de religion et surtout de partage.”
“Ce qui m'ennuie, c'est qu'on stigmatise une religion”
Pour Beye, l'impact du ramadan sur les performances sportives est un faux débat. “Moi, ce que je vois aujourd'hui, c'est que je vois mes joueurs qui jeûnent, qui sont à côté de joueurs qui ne jeûnent pas, il y a un échange, ça rigole, ils partagent les mêmes moments et ça, ça s'appelle de la cohésion. Et donc, j'ai un immense respect pour ça et en aucun cas aujourd'hui mon équipe est impactée par le ramadan ou une autre religion et vous l'avez vu ce soir. J'ai aujourd'hui 14 joueurs qui font le ramadan et j'en avais 6 aujourd'hui qui étaient sur le terrain et qui ont jeûné et qui ont coupé le jeûne à 19h10, le match à 19h30. Vous avez vu le match de Merwan lfnaoui aujourd'hui ? Ça vous donne la réponse à la problématique que tout le monde expose aujourd'hui sur le ramadan. C'est tout simple. Donc ce qui m'ennuie, c'est la discrimination religieuse, et ça en est une, parce qu'on stigmatise une religion et si on fait ça, alors à un moment donné, il faudra l'appliquer sur toutes les religions et ça me dérange.”
“Je ne suis pas musulman, je ne suis pas catholique”
Beye a ensuite eu des mots très forts en rappelant qu'il n'a pas de confession en particulier : “Je suis très fier que mes joueurs se retrouvent dans leur foi, quelle qu'elle soit, parce que j'ai un immense respect. Ma maman est catholique, mon papa est musulman. Et je suis désintéressé, parce que, comme je l'ai dit à tout le monde, je ne pratique aucune religion. J'ai mes croyances qui sont les miennes mais je n'ai pas d'affinités à défendre une religion ou une autre puisque moi, je ne suis pas musulman, je ne suis pas catholique, je ne suis pas bouddhiste, j'ai juste mes croyances à moi. Donc ma prise de position n'est que la prise de position d'un coach qui soutient ses joueurs dans tout ce qu'ils font et surtout lorsqu'ils pratiquent une foi qui leur est propre et qui fait partie de leur éducation et de leur construction d'homme et ça, pour moi, ce sont des valeurs que vous ne pouvez pas détruire.” Un sacré appel à l'unité !