RD Congo : Constant Omari, président illégitime de la FECOFA ?

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Réélu à la tête de la Fédération congolaise de football association (Fecofa) le 24 mai dernier à Kindu dans la province du Maniema, Constant Omari est reparti pour un mandat de 4 ans à la présidence de l'instance. Jusque là, tout va bien… Sauf que le puissant patron congolais est une véritable énigme. Radié par le ministère des Sports en 2001, comment est-il parvenu à atteindre la sommet de la FECOFA ?


Le football congolais regorge décidément de bon nombre de zones d'ombre. Et ce n'est pas Constant Omari Selemani qui pourrait dire le contraire. Ingénieur civil spécialiste en génie ferroviaire de formation, et directeur général du Département du Port de Kinshasa, l'homme d'affaires devenu président de la Fédération congolaise de football et a même entamé un nouveau mandat à la tête de l'instance depuis la fin du mois de mai.

Et c'est justement l'élection du dirigeant qui commence à -enfin- susciter les interrogations. Les langues commencent à se délier et le monde sportif se demande comment le dirigeant a pu accéder à un tel poste, et surtout comment il peut continuer à exercer ses fonctions au sein de la FECOFA, alors qu’il a été radié par un arrêté ministériel daté du… 22 novembre 2001.

A cette date, le ministre des Sports de l'époque, Timothée Moleka Nzulama, décide la radiation du mouvement sportif congolais, de Constant Omari, alors premier vice-président de la FECOFA, et motive sa décision par le fait que l'intéressé a tenu depuis l'étranger sur une chaîne de télévision privée, des “propos discourtois de nature à entamer la crédibilité de l'administration des sports‘ (Les faits remontent au 4 octobre 2001).

L'arrêté ministériel

Vu le n°004/2001 du 20 juillet 2001 portant dispositions générales applicables sans but lucratif et aux établissements d’utilités publiques,
Vu le Décret n°025/ 2001 du 14 avril 2001 portant nomination des Membres du gouvernement de la République Démocratique du Congo ;
Vu, tel que modifié à ce jour, l’Arrêté Départemental BCI CAB/ 2100/044/77 du 15 avril 1977 portant révision de l’organisation du Sport en République démocratique du Congo ;

Attendu que Monsieur Constant Omari, premier vice-président de la Fédération congolaise de football association (FECOFA), à partir de l’étranger le 4 octobre 2001, a tenu à la presse audiovisuel des propos discourtois de nature à entamer la crédibilité de l’administration des Sports, sans mandat tel qu’exprimé dans la lettre de la FECOFA n°FBA/SEGAL/ 1684/2001 du 13 novembre 2001 ;
Constatant son refus de répondre à l’invitation de la Direction des Activités physiques et Sportives pour justifier cette attitude vexatoire en présence du Président et du Secrétaire fédéral, tous deux correspondants officiels, le 24 octobre, bravant ainsi l’autorité légalement établie ;

Considérant que Monsieur Constant Omari Selemani a toujours entretenu un climat de désinvolture à l’égard du ministre de la Jeunesse et des Sports et qu’il se trouve dans un cas de récidive prononcé ;
Attendu que les textes régissant le sport en République Démocratique du Congo recommandent le respect de l’éthique par tous dirigeants appelés à gérer différents domaines des sports ;
Attendu que, par ce comportement récidiviste, Monsieur Constant Omari enfreint les dispositions des Règlements Généraux des Sports en République Démocratique du Congo et qu’il y a lieu de le sanctionner sévèrement :

Par ces motifs ;

ARRETE

Article 1 : Monsieur Constant Omari Selemani est radié du Mouvement Sportif National de la base au sommet, et ne peut, par conséquent, être éligible et électeur.

Article 2 : Toutes les dispositions antérieures contraires au présent Arrêté, sont abrogées.

Article 3 : Le Secrétaire Général aux Sports et Loisirs est chargé de l’exécution du présent Arrêté qui sort ses effets à la date de sa signature.

Fait à Kinshasa, le 22 avril 2001

Timothée Moleka Nzulama

Une radiation prononcée par arrêté qui, dans les faits, doit donc mettre un terme aux activités de Constant Omari au sein de la Fédération. D'autant plus que du côté de l'instance, Omari n'est pas soutenu. Bien au contraire.

Les déclarations de notre 1er vice-président sur une chaîne de télévision à l'étranger n'ont jamais fait l'objet d'une concertation au niveau de notre Comité exécutif. Celui-ci n'étant pas le porte-parole du Comité exécutif et se trouvant en Europe sans mandat du Comité exécutif, les propos qu'il a tenus, jugés de désobligeants envers les autorités de la tutelle, n'engagent donc que sa propre personne ainsi qu'il l'avait déclaré lors de l'émission en question qu'il faisait à titre personnel“, avait-on même fait savoir du côté de la FECOFA.

Sauf que le lendemain, la même FECOCA s'est ravisée pour soutenir de tout son poids celui dont elle venait de se désolidariser, en invoquant l'autonomie de l'instance, comme prévu par les statuts de la CAF et de la FIFA, afin d'éviter toute ingérence gouvernementale.

La Fédération est même allée jusqu'à dénoncer l'arrêté en question, soudainement perçu comme une “tentative de déstabilisation de la Fédération congolaise de football association en période capitale de la préparation de l'équipe nationale pour la finale de la CAN 2002 au Mali“. Revirement de situation pour le moins inattendu…

Mais dans les faits, en tant que premier responsable de la gestion du mouvement sportif congolais le ministre des Sports a le pouvoir d'auditer, de suspendre, de révoquer et même de radier tout dirigeant qui s'écarte de l'éthique sportive. Ce qui est l'exemple même du cas Constant Omari.

Un litige similaire avait opposé le ministère congolais des Sports et la direction de la FECOFA autour du mandat de l'ancien président de l'instance, Nozy Mwamba (aujourd'hui poursuivi par la justice française au sujet d'une autre affaire). Un différend entre les deux parties qui avait finalement été débloqué par la CAF et conduisant à l'éviction progressive du dirigeant.

Alors, comment Constant Omari est-il lui parvenu à passer entre les mailles du filets pour parvenir au sommet de la Fédération congolaise ?* Mystère….


* Pour l'heure, nos demandes d'explications du côté de la FECOFA n'ont pas abouti.

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Mansour Loum