Rolland Courbis: “Candidat à rien”

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Ancien entraîneur de l'OM, de Montpellier ou des Girondins de Bordeaux, Rolland Courbis a attendu d'avoir 58 ans pour découvrir l'Afrique. Le temps d'une CAN avec le Niger où le technicien français a pu appréhender toutes les données du continent. Annoncé au Gabon, au Sénégal ou bien encore au Cameroun et en Algérie, “Coach Courbis” s'est confié en exclusivité à Afrik-Foot.



Afrik-Foot: Rolland, deux mois après, que retenez-vous de votre première expérience africaine ?

Rolland Courbis: J'ai pris beaucoup de plaisir à accompagner cette équipe du Niger, à organiser les entraînements, les réunions… Au final, j'en suis satisfait. Même si on n'est pas sortis de la poule, on a fait de gros progrès en très peu de temps. Alors, bien sûr, un entraîneur ou un sélectionneur est jugé sur ses résultats mais là, je pense qu'on a fait du bon boulot dans une poule presque impossible (Gabon, Maroc, Tunisie, NDLR). Au premier match, on perd trois joueurs sur blessure, dont celui qui est sans doute notre meilleur élément.

On sent quelques regrets…

Bien sûr. On a perdu de justesse contre le Maroc (1-0) et la Tunisie (2-1). On a laissé beaucoup de forces dans le premier match et on prend un but contre la Tunisie à la 91e minute. Ce n'est pas innocent. Ensuite, on joue le Maroc qui est déjà éliminé. On fait un match sérieux mais, si il y avait eu de l'enjeu, peut-être que le résultat aurait été différent.

Franchement, est-ce que le Niger avait ce qu'il fallait pour sortir de cette poule ?

Ça s'est joué à pas grand chose. On peut avoir des regrets. A mon avis, on aurait pu en surprendre plus d'un. Je ne dis pas qu'on aurait pu aller au bout mais peut-être sortir de la poule, oui. Il nous a manqué un peu plus de préparation. On a été les premiers à s'y mettre mais une semaine de plus nous aurait fait du bien. Surtout que le premier match a conditionné les deux autres.

Quel était votre rôle exact au sein du Mena ? Vous aviez été annoncé comme conseilleur du sélectionneur, Harouna Doula, mais on vous a plus senti entraîneur.

Peu importe la dénomination. On était parti sur l'idée d'une collaboration entre deux techniciens. Mais, dès le premier match contre le Gabon, les différences sont devenues évidentes. Nous n'avions pas le même point de vue. Après, dire qui a raison qui a tort, c'est difficile. J'ai essayé d'argumenter avec une certaine logique. On ne démarre pas face au Gabon, pays hôte de la compétition, avec quatre joueurs offensifs qui ne savent ni défendre ni se replacer. Je ne dis pas qu'on aurait gagné si on m'avait écouté mais bon…

Est-ce à dire que le staff du Niger s'était vu trop beau ?

Ce que je dis, moi, c'est que le Niger s'est qualifié en obtenant neuf points à Niamey. C'est donc que la formule du Niger à l'extérieur ne marche pas. Là, une CAN, c'est forcément à l'extérieur. J'ai montré du doigt les problèmes. Il n'y a pas qu'une seule raison. Mais, si on veut ressembler au Barça, dont les principes sont à la mode, très bien. Mais il faut avoir les joueurs du Barça! Il faut des joueurs capables de jouer comme au Barça. Donnez moi Xavi, Iniesta et Messi, je vous garantis qu'on jouera comme le Barça. Il ne faut pas oublier non plus qu'une des grandes forces du Barça, c'est la récupération. Là, c'était différent…

Vous attendiez-vous à de tels problèmes en signant votre contrat ?

Évidemment. Dans une collaboration comme ça, il y a forcément des différences. S'il n'y en a pas, cela ne sert à rien que je vienne.

Justement, contractuellement, où en êtes-vous ?

On est en discussions. Je dois donner ma réponse avant mi-avril. Mais je dois discuter avec mes employeurs actuels (BFM, RMC et PMU) pour voir ce qu'il est possible de faire afin d'organiser mon planning.

Dans l'absolu, c'est une proposition qui vous intéresse ?

Pourquoi pas ? Mais je ne peux, ni ne veux, lâcher mes engagements actuels. Mais, si cela se faisait, je ferais des aller-retours fréquents. Il y aurait deux personnes sur place pour travailler localement, comme cela a pu être fait lors du match amical face à l'Egypte, au Qatar.

On évoque également d'autres pistes…

C'est vrai. On a parlé de l'Algérie, du Gabon, du Sénégal, du Burkina Faso, du Cameroun… Mais, déjà, il y a des gens en place. Ensuite, aucun contact n'était concret. Vous savez, quand je reçois un coup de fil et qu'on me demande si la sélection du Cameroun m'intéresse, je dis pourquoi pas. Mais je ne sais pas qui est au bout du fil. Si on a besoin et envie de me voir, on sait où me trouver. Si on a besoin et envie de me parler, on sait où me trouver. A mon âge et avec mon expérience, je ne suis candidat à rien… de partout.

La victoire de la Zambie vous a-t-elle surpris ?

La Zambie était un outsider sérieux avant la compétition de par la compétence du coach et la qualité des joueurs. Le Gabon, le Maroc, le Sénégal, la Côte d'Ivoire et le Ghana étaient les favoris. Devant la Tunisie, le Mali ou la Zambie, les principaux outsiders. Nous, tout le monde disait qu'on était des tocards et nous annonçait à la quatrième place. Finalement, ils n'ont pas eu tord.

Comment expliquez-vous l'échec des grandes nations ?

Déjà, il n'y a plus de petites équipes. Ensuite, ce n'est pas facile de trouver un équilibre. Le Sénégal possède une vingtaine de joueurs de haut niveau. Mais c'est compliqué de trouver un équilibre avec cinq attaquants et de n'en faire jouer que trois. Ensuite, cela se joue à pile ou face avec ce match terrible sous la pluie (face à la Guinée équatoriale, NDLR). Les équipes africaines ont des joueurs méconnus pour certaines mais toutes sont bien organisées. Les progrès du football africain sont évidents, quel que soit le pays. Prenez la Libye, elle a le mérite de se qualifier avec tous les problèmes qui ont touché le pays. Mais il ne lui manque pas grand chose pour en faire une grande nation de football. Le Soudan ou la Guinée aussi, même si on en parle moins. Pour moi, la Côte d'Ivoire, le Maroc ou le Ghana restent au-dessus. Et je le dis: l'Afrique peut gagner la Coupe du monde. Ce n'était pas le cas avant malgré les bon parcours du Cameroun ou du Nigeria. Les équipes africaines ne sont plus déséquilibrées, ce n'est plus tout pour l'attaque. Les blocs défensifs sont en place et les gardiens sont de qualités. C'est flagrant depuis deux Coupe du monde.

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Nicholas Mc Anally