La formation locale est un enjeu clé pour le développement du football africain. Avec la population la plus jeune au monde et une passion immense pour le ballon rond, l’Afrique regorge de talents. Pourtant, chaque année, de nombreux jeunes passent sous les radars faute de détection structurée, tandis que d’autres manquent d’un encadrement adéquat pour exploiter pleinement leur potentiel. À cela s’ajoute le défi des infrastructures, souvent insuffisantes.
Malgré ces obstacles, la formation progresse grâce à des académies de plus en plus structurées et performantes, qui façonnent l’avenir du football africain.
Dans cette série, nous mettons en lumière les pépinières de talents les plus influentes du continent. Pour commencer, dans ce premier volet, focus sur les pionnières qui continuent d’inspirer !
Génération Foot (Sénégal)
Devenue iconique en Afrique, l'académie basée à Dakar est précurseure d'un modèle à succès. Fondé en 2000 par l'ancien international guinéen Mady Touré, le centre a noué partenariat exclusif avec le FC Metz en 2003 sur un modèle alors peu répandu sur le continent. En échange d’une dotation financière et en équipements à l’académie, le club français a une priorité de sélection sur les joueurs qui y sont formés. Ce modèle, cultivé par la rigueur de l'institution dakaroise, permet chaque année à des jeunes sénégalais d'exploiter leur talent.
La réussite de Papiss Cissé (ex-Newcastle, Fribourg) et Fallou Diagne (ex-Rennes, Werder Brême) dès la fin des années 2000 annoncent un succès qui s'affirme au cours des années qui suivront. Diafra Sakho (ex-West Ham), Habib Diallo (Damac) et surtout Sadio Mané (Al-Nassr) font la fierté de la pépinière. D'autres, comme Ismaïla Sarr (Crystal Palace) et Pape Matar Sarr (Tottenham) sont aujourd'hui des cadres de l'équipe nationale. Dernière pépite en date : Lamine Camara (Monaco), considéré aujourd'hui comme un des grands espoirs du football sénégalais.
Les dessous de cette réussite combinent formation technique de haut niveau et suivi éducatif, garantissant un développement complet des joueurs. Son équipe senior, qui évolue en Ligue 1 sénégalaise, est une vitrine pour les jeunes avant leur départ vers l’Europe. Avec des installations modernes et un modèle basé sur ce lien très fort avec Metz, Génération Foot reste un fructueux réservoir de talents.
Brasseries du Cameroun (Cameroun)
Fondée en 1989 par la Société Anonyme des Brasseries du Cameroun (SABC), c'est la première académie à voir le jour au Cameroun, et une des premières sur le continent. Répondant alors à une grande demande, elle devient rapidement un incontournable du football camerounais.
L’académie repose sur une philosophie exigeante : discipline, technique et intelligence de jeu. Bien que basée à Douala, son système détecte, forme et révèle des talents originaires des quatre coins du pays, qui formeront l'ossature des Lions Indomptables des années 1990-2000 : Rigobert Song, Geremi Njitap, Alioum Saïdou, Salomon Olembe et même Samuel Eto’o, pré-formé à l'EFBC. Par la suite, l'ancien lyonnais et marseillais Clinton Njie, l'enfant terrible Didier Lamkel Zé ou le taulier Vincent Aboubakar en sont également sortis. Son dernier export de renom, Carlos Baleba, est considéré comme le plus grand espoir camerounais actuel.
Depuis 2008, l'EFBC a adopté un modèle façon sport-études avec les enfants logés sur place, et continue son activité sur les mêmes principes. En bientôt quarante ans, l'académie s'est bâtie une réputation qui dépasse les frontières du pays. Une longévité exemplaire, qui continue de faire la fierté de la formation sur le continent !
Mimosifcom (Côte d'Ivoire)
Crée en 1994 par les investissements du groupe agro-industriel ivoirien SIFCA et la société de courtage d'assurances SIFCOM, avec l'impulsion et les méthodes du Français Jean-Marc Guillou, le centre de formation de l'ASEC Mimosas est le premier à voir le jour en Côte d'Ivoire. Situé au coeur d'Abidjan, le centre fournit depuis une formation académique et professionnelle gratuite aux jeunes talents du pays.
La quantité de joueurs formés à Sol Béni donne le tournis : les fratries Touré (Yaya et Kolo) et Kalou (Salomon et Bonaventure), Didier Zokora, Gervinho ou encore Aruna Dindane, pour ne citer qu'eux. pour les années 2000-2010 Mais la productivité de l'académie traverse les générations, même après le départ de Jean-Marc Guillou en 2006 et sa reprise par les dirigeants de l'ASEC. En effet, six champions d'Afrique 2024 ont éclos dans la pépinière : Ghislain Konan, Odilon Kossounou, Jean-Michaël Seri, Karim Konaté, Oumar Diakité et Folly Ayayi. Une véritable institution qui prouve son efficacité année après année !
Diambars (Sénégal)
L'institut Diambars est co-fondé en 2003 dans la ville balnéaire de Saly sur l'initiative de quatre hommes : l'investisseur sénégalais Saër Seck, l'ancien international béninois Jimmy Adjovi-Boco, l'ancien international français natif de Dakar Patrick Vieira et l'ancien gardien français d'origine guyanaise Bernard Lama. Inspirée des centres de formation européens, l'académie place autant d’importance à la scolarité qu'à progression sportive, offrant aux jeunes un cadre structuré pour réussir sur et en dehors du terrain. Elle est également reconnue pour son intransigeance au sujet de la fraude sur l'âge, fléau qui décrédibilise trop souvent le football africain.
Au fil des années, le centre a vu éclore plusieurs internationaux sénégalais, dont Idrissa Gana Gueye (Everton), Pape Souaré (ex-Lille, Crystal Palace) ou encore Mikayil Faye (Rennes) comme figures de proue. Ces joueurs, formés dans un environnement exigeant, illustrent le modèle Diambars : discipline, technique soignée et très forte culture tactique.
Le club académique, qui évolue en Ligue 1 sénégalaise, sert aussi de tremplin pour les jeunes avant leur départ vers l’Europe. Diambars avait notamment signé un partenariat avec l'Olympique de Marseille (2019-2022) aux résultats contrastés, dont est tout de même sorti Bamba Dieng (Angers). Le partenariat signé avec la NBA Africa afin de développer une filière basketball est également un des premiers du genre pour une académie de football sur le continent.
Kadji Sport Academy (Cameroun)
À Douala, L'EFBC n'est pas la seule institution qui rayonne. En 1995, Joseph Kadji Defosso (1923-2018), un des hommes d'affaires les plus influents du Cameroun, décide d'investir dans le football et fonde sa propre académie dans la capitale économique du pays. La Kadji Sport Academy (KSA) fonctionne dès sa création comme une école de football privée, alliant formation sportive et éducation académique solide.
Considérée comme l'une des meilleures structures du continent, elle est devenue célèbre au cours des années 2000, pour avoir formé de nombreux beaucoup de joueurs de la “génération dorée” camerounaise : Samuel Eto’o, passé par Kadji en plus de l'EFBC avant son départ vers l'Espagne, mais également l'iconique Carlos Kameni, Stéphane Mbia, Jean II Makoun, Benjamin Moukandjo ou encore Nicolas Nkoulou. Un “alumni” qui force le respect !
Bien que toujours fonctionnelle, la KSA semble aujourd’hui moins influente sur la scène nationale. Malgré cela, elle reste une institution respectée, et son empreinte dans l’histoire du football africain est indélébile.
Les pionnières : modèle européen, paradigme africain
Ces académies pionnières ont bâti leur réputation au fil des décennies. Leur plus grand succès ? S’inspirer des modèles de formation européens tout en les adaptant aux réalités africaines, sans brider l’identité de jeu “locale” de leurs joueurs. Grâce à une approche cohérente et appliquée avec constance, elles ont su traverser les épreuves du temps et inspirer les futures pépinières du continent.
